Cet article est paru le 20 mars dans l’Edition du soir, le quotidien numérique d’Ouest France.
« Sommes-nous au début de la 3ème guerre mondiale ? » Cette question tournait en boucle sur les télés polonaises qui suivent de très près la crise chez leur voisin ukrainien. L’interview de manifestants pro-russe en Crimée déclarant : « Après l’Ukraine, nous irons jusqu’à Varsovie ! » contribuait également a alimenter les peurs. Cette actualité réveille aussi des craintes enfouies liée à une histoire encore récente : massacre de 22000 officiers polonais à Katyn par l’Armée rouge et occupation du pays par l’armée russe à la fin de la seconde guerre mondiale. Les Polonais ont toutes les raisons de se méfier de leur puissant voisin. Mais dans les pays baltes, l’inquiétude est encore plus grande, car la Lettonie et l’Estonie ont des minorités russophones.
L’Ukraine occupe aussi une place à part dans le cœur des polonais car une partie occidentale de l’Ukraine (dont la ville de Lviv était polonaise) et il y a un peu plus de 100000 ukrainiens d’origine polonaise dans le pays.
« La crise ukrainienne, c’est comme le Printemps arabe, on ne s’y attendait pas vraiment, explique un haut fonctionnaire polonais en charge de la sécurité nationale. On ne croyait pas à ce scénario. L’Ukraine est un test pour la diplomatie de la communauté internationale. La Russie crée un dangereux précédent en Europe. L’UE et l’Otan doivent être ferme et adopter des sanctions. C’est un moment de vérité. » La Pologne a demandé une réunion d’urgence de l’Otan sous l’Article 4, c’est à dire quand un membre considère que « l’intégrité territoriale, l’indépendance politique ou la sécurité de l’une des parties » est menacée. Une demande très exceptionnelle depuis la fin de la guerre froide. La Pologne a aussi demandé que l’Otan envoie des troupes sur son territoire pour parer à toute éventualité. Demande refusée pour le moment. Mais les Etats Unis viennent d’envoyer 12 chasseurs F16 en Pologne ainsi qu’un avion de surveillance aérienne Awacs et 6 chasseurs F15 dans les pays baltes. Preuve que la situation est prise très au sérieux. La Pologne étudie aussi la possibilité de créer une brigade commune avec l’Ukraine.
« Le problème de Poutine, c’est qu’il est imprévisible. Jusqu’où ira-t-il ?, s’alarme ce haut fonctionnaire. Il n’est pas totalement rationnel. Nous devons envoyer des signaux forts. C’est notre seule arme pour le moment. Si nous montrons notre faiblesse, les Russes l’utiliseront. L’Europe et les Etats Unis doivent être unis, il n’y a pas d’autre alternative. »