Photo: Diane Grimonet
Sur un téléphone portable prêté par un ami, Habib fait défiler les photos de son profil Facebook: on y voit des portraits de la star Justin Bieber, des voitures américaines, mais aussi des selfies réalisés au guidon d’une moto, sur un pont face à la mer ou devant une fontaine éclairée. Ses copains du réseau social – « 129″, précise-t-il – le flattent avec des « beau sourire » ou « jolie photo Habib ». Les suivantes sont plus dures à regarder et ne reflètent pas la vie d’un ado de 14 ans: « Celle-là, c’est mon école à Kaboul détruite après un attentat commis par Daech »; « là, c’est un bateau de migrants que j’ai vu quand j’étais en Turquie »; « et là, c’est mon petit frère de 3 ans avec une Kalachnikov… » Né en Afghanistan le 1er juin 2001, Habib est arrivé il y a 17 jours au camp de réfugiés de Calais (62) au terme d’un périple d’« un an et quatre mois » à travers le Moyen-Orient et l’Europe. Avec lui, un garçon qu’il présente comme son grand frère ne le lâche pas d’une semelle. Méfiant, Javed dit avoir 21 ans mais en fait cinq de moins: mentir sur son âge ou se vieillir peut vous sortir d’un mauvais pas dans l’immense bidonville de la zone industrielle des Dunes où s’agglutinent plus de 2000 migrants. « Si on a de la chance, on passera en Angleterre », espèrent Habib et Javed, dont le père a immigré à Londres depuis peu. Deux fois, ils ont tenté de pénétrer dans le tunnel sous la Manche. Deux fois, ils ont échoué. Mais cette nuit, ils comptent bien y arriver.
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